« VAUX MIEUX DE MOURIR DANS LA MER QUE DE RETOURNER EN LIBYE »


Chardel Divin Nzei, étudiant chercheur en droit privé comparé à l' Université Ibn Zohr d'Agadir (Maroc) lauréat du concours d'Art Oratoire 2019 à Agadir sous le thème: Le droit des migrants.

Ils étaient environ quarante dans le bateau pneumatique mais il n’y avait en fait de la place que pour la moitié.
Ces  passeurs sont des hommes sans cœurs, ils crient sur les gens,
Les volent,
Et les frappent quand ils embarquent.
C’était une sorte de torture psychologique qui avait commencé avant d’embarquer.
Il y a plus de six (06) mois, il a versé 1500 dollars à un passeur libyen pour pouvoir traverser la mer méditerranée.

Avant cela, il avait été forcé d’attendre un mois dans un camp de fortune dans le désert à l’Ouest de la Libye où les trafiquants rassemblent les réfugiés désireux de tenter leur chance et formant certains d’entre eux à la navigation pour qu’ils assurent eux même la traversée.
Le bateau était composé des subsahariens, des syriens et égyptiens dont deux (02) syriens avaient trouvés la mort par asphyxie car ils ne pouvaient pas respirer à cause des émanations du moteur. C’était un bancal, on ne pouvait pas se mettre debout ou bouger. Dès que quelqu’un le faisait, le bateau menaçait de chavirer.
Il y avait beaucoup de hurlement des femmes et des enfants désespérés par les flots de la mer.
Peu après avoir quitté les côtes libyennes, le moteur est tombé en panne et l’embarcation s’est mise à dériver pendant deux heures à la grande panique des passagers.
Par chance deux égyptiens étaient mécaniciens et ont réussis à réparer le moteur et faire repartir le zodiac qui a continué sa route pendant dix heures avant d’être appréhender par un navire de pêche espagnole au Sud de l’Ile Malte.

Monsieur le président du jury
Mesdames et messieurs membres du jury
Ma plaidoirie de ce jour consiste à vous faire voyager au cœur de cet univers des millions de migrants politiques et économiques qui quittent leurs  pays avec l’espoir de retrouver une vie meilleurs en Europe.

Du haut de cette tribune, je viens dénoncer le non-respect des conventions internationales sur la protection des droits de l’homme qui est toujours d’avantage un rêve qu’une réalité ; l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme stipule que : « chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne ».
Pensez-vous qu’il est applicable ?
La traite des esclaves africains en Libye est une réponse claire et nette.
Je vais donc vous parler de Matondo qui se traduit par « merci » en lingala, ce jeune homme de 16 ans ayant déjà l’expression de ceux qui grandissent vite. Originaire de la RépubliqueDémocratique du Congo, grandi dans la province du Sud Kivu à l’Est du pays voisin du Rwanda, du Burundi et de la Tanzanie. Il a parcouru en l’espace de trois (03) mois plus de 4000 kilomètres en passant par trois (03) pays avant d’arriver en Libye.
Un périple qui a débuté en janvier 2017 lorsqu’il se lance sur la route grâce au pécule (environ 2000 dollars) hérité de son père décède d’un éboulement de terre dans une mine de coltan en novembre 2016.


Monsieur le président du jury
Mesdames et messieurs membres du jury
Croyez-moi !
En plaidant la cause des migrants particulièrement celle de  Matondo parce que j’en sais quelque chose. Originaire du Congo Brazzaville que je suis, nous partageons les mêmes peuples, cultures et coutumes. La République Démocratique du Congo est notre voisin immédiat, les deux (02) Congo forment les deux (02) capitales les plus rapprochées au monde séparés par une frontière naturelle qui est le fleuve Congo.
Presque tous les jours, les médias lancent des cris d’alarmes sur l’insécurité dans la province du Sud Kivu avec la présence des troupes armées et milices rebelles, viols, pauvretés, Ebola
Orphelin de père et de mère , Matondo se voit obligé de quitter son pays pour l’Europe car pour lui elle représente la terre de liberté et de possibilité. Mon œil !
En passant par le Centrafrique, le Tchad et le Niger pour atteindre la Libye à bord d’un bringuebalant ou pick - up. Arrivé au Niger, Matondo parvient jusqu' Agadez, la grande ville qui précède l’entrée dans le désert.
Dans ce paysage infini de sable et de rocaille où les températures atteignent souvent plus de 42°c, à leur passage des corps sans vie des migrants abandonnés par les passeurs cupides.

Une fois à bord du bateau de pêche espagnole, chacun remerciait son Dieu d’autres ses ancêtres dans sa langue maternelle pour avoir eu les secouristes et l’arriver en Europe était déjà prometteuse pour Matondo car l’espoir naissait du bout des lèvres.
Il y a un adage africain qui dit « on se moque pas du caïman si l’on n’a pas encore traversé le fleuve », à leur grande surprise ils étaient surpris d’apprendre qu’aucun pays ne permettait au bateau l’entrée au port que ça soit l’Italie ou Malte, malgré l’insistance du capitaine compte tenu de la situation limite à bord :
-          Manque de provision
-          Surcharge du bateau
-          L’état critique des enfants déshydratés qui nécessite une évacuation
-          Une tempête qui approchait

Quant aux services espagnols de sauvetage maritime, avec lesquels les marins sont en contact proposent la solution de les renvoyer en Libye.

«  VAUX MIEUX DE MOURIR DANS LA MER QUE DE RETOURNER EN LIBYE » Scandaient tous les migrants à bord.


Monsieur le président du jury
Mesdames et messieurs membres du jury
Voyez-vous comment les gens préfèrent la mort que de retourner en Libye ?
A leur place je ferai autant, vaut mieux de mourir dans la mer que d’être esclaves au 21ème siècle pendant que l’article 4 de la déclaration universelle des droits de l’homme l’a interdit : « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude; l'esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes. ».

J’image à cet instant l’abondant de la communauté internationale face à ce phénomène de flux migratoire qui continu à engloutir cette jeunesse qui forme la force et la fierté de notre cher continent l’Afrique plus riche que tous par son sous-sols mais aux régimes autoritaires et totalitaires.
Est-ce qu’ils sont libres de choisir de vivre dans un pays qui n’est pas les leur ?
Cette question trouve sa réponse dans la même convention dans son article 13 : «  Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. Toute  personne  a le droit de quitter tout pays, y compris le sien et de revenir dans son pays ». Respectons-le !

Selon Leonard Doyle, le porte-parole de l’Organisation Internationale pour les Migrants «  si le pays exerce un contrôle sur le bateau et s’il y a bord des migrants en détresse et qu’aucun accord n’a pu être trouvé avec un autre pays pour les accueillir, il ne devrait  pas tergiverser mais les accepter ».
Le ministre italiens Matteo Salvini a justifié le refus de Rome de laisser entrer le bateau en affirmant que le gouvernement ne pourrait pas être contraint à transformer « l’Italie en un gigantesque camp de réfugiés ».

Face à ce refus, cette humiliation, j’ai décidé depuis lors d’être un avocat défenseur des droits de l’homme. Ne dit-on pas que la loi ne frappe que les faibles ?

Je vais conclure ma plaidoirie par la citation de Nelson Mandela qui disait : « Quand un homme est privé du droit de vivre dont il croit, il n’a pas d’autres choix que de devenir un hors la loi ».




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